dimanche 17 octobre 2010

maturation


Je me suis réveillé en retard ce matin.
Correction. Ce matin j'étais très en retard puisque je devais préparer le repas pour mes voisins que j'avais invité à un moment où j'avais eu une poussée de sociabilité fugace. À dire vrai, j'avais aussitôt regretté mon geste. Mais vu qu'ils avaient tous accepté, je ne pouvais plus me rétracter.
Le rendez-vous était à midi, et il était 11h53.
J'ai sauté dans mon tas de fringue et me suis relevé tout habillé. J'ai grillé les marches dans l'escalier pour foncer, à travers la fraîcheur extérieure, dans la boucherie la plus proche pour prendre des steaks hachés afin de faire, vu le temps qu'il me restait, en plat principal, un œuf à cheval.
J'ai forcé la porte coincée du magasin. Le diling a retentit. À l'intérieur, juste un client qui profitait que la boutique était vide pour tailler une bavette de quinze mètres de long avec le boucher qui lui, ne semblait jamais rassasié. Pour rompre leur échange, j'ai toussoté légèrement. Un silence de plomb est tombé dans la boucherie.
J'ai pris mes steaks et la direction de la sortie. La porte, déjà difficile à ouvrir, l'était d'autant plus à fermer. J'ai voulu la laisser entre-ouverte, mais le boucher et le client, qui déjà, de l'intérieur, ne me lâchaient pas du regard, cette fois, étaient prêt à me farcir si je partais sans l'avoir fermée. J'évitais de la ramener et donc, j'ai posé à terre mon sac de viande pour pouvoir prendre la porte à deux mains. J'ai saqué dessus sous les regards bovins des deux compères. Elle a fini par se fermer dans un grand boum, puis un crac. Le crac venait d'au dessus alors, juste par curiosité, j'ai jeté un œil pour découvrir qu'une lettre de l'enseigne était légèrement délocalisée. J'ai dû, malgré moi, faire une mine contrainte, car le boucher et le client se sont dirigés avec virulence vers la sortie. En même temps, je me suis mis à reculer, un peu comme pour garder une certaine distance de sécurité. Finalement, vu que je la trouvais pas assez grande, j'ai couru. Le boucher et le client ont ouvert la porte sans soucis et ont désiré me prendre en chasse. Malheureusement, ils se sont pris les pieds dans mon sachet de steaks hachés que je n'avais pas eu le réflexe de récupérer avant de fuir devant mon forfait. J'étais pas prêt d'y retourner.
J'ai fait plein de détours pour être sûr qu'ils ne me retrouveraient pas. Il était 17h31 quand je suis arrivé dans ma rue. Ne voulant pas être confronté à mes voisins qui devaient être furieux que je les ai invité dans le vide une fois de plus, j'ai continué à marcher et suis passé devant chez moi sans m'arrêter. J'ai déjà changé treize fois d'identité pour brouiller les pistes, mais treize changements de locataire du même appartement en deux semaines, ça fait beaucoup. Un quatorzième virerait au louche.
Non, cette fois, il a fallu assumer. J'ai fait le mort.

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